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Le Paradoxe Kerbrat : Entre Addiction, Vote et Loi Narcotrafic, un Député Insoumis Met le Système à l’Épreuve

L’Assemblée Nationale, temple de la démocratie et de la représentation du peuple, est parfois le théâtre de paradoxes troublants. L’affaire Andy Kerbrat, député de La France Insoumise (LFI), en offre une illustration éloquente, voire subversive. En arrêt maladie pour soigner une addiction à la 3-MMC, une drogue de synthèse, Kerbrat continue pourtant de voter, via une délégation, sur des lois cruciales, notamment celle sur le narcotrafic. Un exercice de démocratie déléguée qui soulève des questions éthiques et politiques.

Drogue, Démocratie et Paradoxes Politiques

En octobre dernier, Kerbrat est interpellé alors qu’il tente d’acquérir de la 3-MMC auprès d’un mineur. Cet acronyme barbare, 3-MMC, désigne une molécule de la famille des cathinones de synthèse, des substances psychoactives souvent vendues comme alternatives à la cocaïne ou à l’ecstasy, et dont la dangerosité est loin d’être négligeable. L’incident provoque un séisme politique. Le député reconnaît avoir « fait n’importe quoi » avec ses frais de mandat et se retire de l’Assemblée pour suivre un parcours de soins. La question qui se pose alors est la suivante : un élu en proie à une addiction, et donc potentiellement vulnérable à des pressions extérieures, peut-il légitimement continuer à exercer son mandat, même par procuration ?

La réponse, dans le système parlementaire français, est oui. Grâce à la délégation de vote, une pratique courante, un député malade peut désigner un collègue pour voter en son nom. Dans le cas de Kerbrat, c’est Ségolène Amiot, également députée LFI, qui exerce ce droit. Elle vote donc deux fois : pour elle-même et pour Kerbrat, suivant scrupuleusement la ligne du groupe insoumis.

Contre le Narcotrafic… ou Contre la Loi ?

Le paradoxe atteint son apogée lorsque l’on constate que Kerbrat, via sa délégation, vote contre plusieurs amendements du projet de loi sur le narcotrafic. Comment comprendre cette position ? Selon le député, contacté par franceinfo, il reste totalement aligné sur la position de son groupe, qui juge le texte « inefficace et dangereux ». Pour LFI, la loi ne s’attaque pas aux racines du problème, à savoir les inégalités sociales et le manque de prévention en matière de santé publique. Elle privilégie une approche répressive, avec la création d’un parquet national antistupéfiants, un nouveau régime carcéral pour les narcotrafiquants et l’extension de la surveillance algorithmique – une intrusion potentielle dans la vie privée des citoyens.

Il est important de saisir ce qu’est la surveillance algorithmique. Elle consiste à utiliser des algorithmes, des suites d’instructions informatiques, pour analyser des données massives (big data) issues des échanges téléphoniques et des recherches internet, dans le but de détecter des comportements suspects. Cette technique, bien que présentée comme un outil de lutte contre la criminalité, soulève des inquiétudes quant au respect des libertés individuelles et au risque de profilage abusif.

Une Ironie Mordante et des Réflexions Amères

L’affaire Kerbrat suscite peu de réactions, preuve que la mécanique parlementaire, même lorsqu’elle semble boiteuse, continue de tourner. Seul l’entourage du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, se permet une ironie mordante, comparant Kerbrat aux « dindes » qui auraient peur de Noël. Une comparaison cynique qui souligne le fossé idéologique entre la majorité gouvernementale, favorable à une répression accrue, et LFI, qui prône une approche plus axée sur la prévention et la réduction des risques.

Au-delà du cas particulier de Kerbrat, cette affaire met en lumière les contradictions de la lutte contre la drogue. Faut-il privilégier la répression ou la prévention ? Comment concilier la sécurité publique et les libertés individuelles ? Et surtout, comment aider les personnes souffrant d’addiction à se sortir de l’engrenage ? Autant de questions complexes qui méritent un débat de fond, loin des slogans simplistes et des postures moralisatrices. L’histoire d’Andy Kerbrat, aussi singulière soit-elle, nous rappelle que la politique est rarement manichéenne et que les enjeux sont souvent plus complexes qu’il n’y paraît.

Cet article a été fait a partir de ces articles:

https://www.radiofrance.fr/franceinfo/podcasts/le-brief-politique/loi-narcotrafic-l-insoumis-andy-kerbrat-en-arret-pour-sortir-de-l-addiction-a-la-drogue-vote-contre-plusieurs-amendements-4726061, https://www.radiofrance.fr/franceinfo/podcasts/le-brief-politique/rearmement-de-la-france-la-region-occitanie-prevoit-un-plan-de-200-millions-d-euros-pour-soutenir-les-entreprises-de-defense-sur-son-territoire-3039183, https://www.radiofrance.fr/franceinfo/podcasts/le-brief-politique/gouvernement-de-francois-bayrou-elisabeth-borne-et-gerald-darmanin-s-affrontent-de-nouveau-par-medias-interposes-1625990, https://www.radiofrance.fr/franceinfo/podcasts/le-brief-politique/gouvernement-de-francois-bayrou-la-question-du-port-du-voile-dans-le-sport-fait-apparaitre-des-clans-au-sein-de-l-executif-2521470, https://www.radiofrance.fr/franceinfo/podcasts/le-brief-politique/le-ministre-de-l-interieur-bruno-retailleau-rompt-avec-la-tradition-de-l-iftar-a-la-grande-mosquee-de-paris-4468294

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