Le Silence Assourdissant de la Science : Face aux Démantèlements de Trump, les Organisations Scientifiques Coupables de Complicité ?
L’ère Trump, tel un raz-de-marée dévastateur, s’est abattue sur le monde scientifique. Mais au-delà des assauts directs, une observation plus troublante émerge : le silence complice de certaines organisations scientifiques. Ces institutions, censées être les fers de lance de la recherche et les voix de leurs membres, se sont avérées étonnamment muettes face à la destruction méthodique orchestrée par l’administration Trump.
Quand la Marée se Retire : La Déliquescence des Soutiens Affichés
L’expression « quand la marée se retire, on voit qui nage nu » prend tout son sens dans ce contexte. Ces organisations scientifiques, autrefois prompts à afficher leur soutien aux populations vulnérables et à la recherche fondamentale, se sont terrées dans un silence assourdissant, préférant la prudence à la défense active de leurs principes. On parle ici d’organisations professionnelles ou de groupes d’intérêt spéciaux qui, théoriquement, sont là pour défendre les intérêts de leurs chercheurs et les valeurs de la science.
Des Coupes Budgétaires Ciblées : L’Équité, la Santé et les Marginalisés en Ligne de Mire
Depuis janvier 2025, l’administration Trump a impitoyablement taillé dans les budgets fédéraux alloués à des projets de recherche axés sur l’équité, les disparités en matière de santé et les communautés marginalisées. Certaines organisations, comme l’American Public Health Association (APHA), ont courageusement pris position en rejoignant une action en justice initiée par l’ACLU (American Civil Liberties Union) pour protéger ces projets essentiels. Seize procureurs généraux d’État ont également emboîté le pas. Cependant, à ce jour, aucune autre société savante, à ma connaissance, n’a entrepris de telles démarches pour contester juridiquement ces suppressions de fonds, malgré les protestations véhérentes de scientifiques individuels.
Un Silence Assourdissant : L’Expérience de la Société de Médecine Comportementale
J’ai pu constater cette passivité de mes propres yeux lors de la conférence de la Society of Behavioral Medicine (SBM) à San Francisco. Près de 2 000 chercheurs s’y sont réunis pour discuter des avancées médicales dans un environnement de soins de santé en pleine mutation. En tant que chercheur en santé publique et professeur spécialisé dans le VIH, la stigmatisation et l’équité en matière de santé, je me suis toujours efforcé de garantir que les groupes historiquement négligés ou exclus ne soient pas effacés des programmes de recherche. Le silence de ma propre société savante, dans un moment aussi crucial, a résonné d’une manière particulièrement amère.
#TerminatedScience : Une Pétition et des Témoignages Accablants
Lors de la conférence, des scientifiques ont fait circuler une pétition demandant aux dirigeants de la SBM de se joindre à l’action en justice de l’ACLU. Cette initiative, lancée par la psychologue sociale Laramie R. Smith, dont les travaux mettent en lumière le rôle de la stigmatisation dans la répartition inégale du VIH aux États-Unis et dans le monde, visait à obtenir l’arrêt des annulations de subventions motivées par des considérations politiques, sous le mot-clé #TerminatedScience. En moins de 24 heures, la pétition a recueilli plus de 300 signatures, et en compte aujourd’hui plus de 400. Au-delà des chiffres, les commentaires des signataires étaient poignants et accablants. Ils ont exprimé de vives inquiétudes quant à l’érosion de la liberté académique et de l’intégrité scientifique. Nombre d’entre eux ont qualifié les annulations de l’administration Trump d’attaque directe contre la science et la recherche fondée sur les faits, avertissant que l’ingérence politique non seulement freine les progrès, mais met activement en danger la santé publique. Ils ont également souligné les conséquences humaines de ces décisions, car bon nombre des projets supprimés visaient à promouvoir l’équité en matière de santé, en s’attaquant aux disparités auxquelles sont confrontées les personnes LGBTQ+, les communautés BIPOC, les femmes, les immigrés et les populations rurales.
La Complicité du Silence : Une Question d’Intérêts
Malgré cette mobilisation, le conseil d’administration de la SBM a voté contre le fait de se joindre à l’action en justice. Leur communication ultérieure, envoyée à la liste de diffusion des membres, indiquait qu’ils avaient « examiné attentivement et longuement la question » et qu’ils avaient finalement décidé que, compte tenu des obligations fiduciaires du conseil d’administration, « il n’était pas dans l’intérêt supérieur de la Société de devenir co-demandeur ». Aucune autre explication n’a été fournie : aucun critère pour une action future, aucun calendrier et aucune invitation au dialogue ouvert. Pour une société fondée sur les sciences comportementales et sociales, ce manque de transparence et d’engagement communautaire est stupéfiant.
L’Heure des Choix : Repenser son Adhésion ?
Cette expérience m’a laissé avec une prise de conscience troublante : les organisations scientifiques auxquelles nous appartenons sont-elles réellement prêtes à défendre la science lorsqu’elle est attaquée ? Si l’APHA a pris ses responsabilités, d’autres organisations, telles que l’American Psychological Association, la National Academy of Sciences et l’American Association for the Advancement of Science, feront-elles de même ? Les scientifiques doivent poser cette question à leurs sociétés savantes et exiger des réponses concrètes. Ces organisations nous représentent, nos valeurs et notre travail. Si elles ne sont pas disposées à prendre position maintenant, lorsque la science est politisée, ciblée et punie, quel message cela envoie-t-il quant à leur engagement envers notre mission collective ? Et ce ne sont pas seulement les scientifiques qui méritent des réponses, mais aussi les contribuables qui soutiennent ce travail depuis des décennies, convaincus que la science sert véritablement le public, en particulier les plus vulnérables. Lorsque les institutions choisissent le silence plutôt que la défense, cela soulève de sérieuses questions quant aux intérêts qu’elles protègent réellement. Le silence n’est pas la neutralité, c’est la complicité. Et la science mérite mieux.
Cet article a été fait a partir de ces articles:
https://www.scientificamerican.com/article/trump-cuts-should-trigger-loud-protests-from-scientific-societies/, https://www.scientificamerican.com/article/north-america-may-be-dripping-away-deep-under-the-midwest/, https://www.scientificamerican.com/article/shift-from-fossil-fuels-to-renewable-energy-will-persist-despite-trump/, https://www.scientificamerican.com/article/nasa-and-noaa-trump-funding-cuts-jeopardize-these-key-climate-and-space/, https://www.scientificamerican.com/article/alan-turings-lost-work-could-reveal-how-tigers-got-their-stripes/
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