L’intelligence artificielle (IA). Ce terme, omniprésent dans notre lexique contemporain, évoque un futur radieux peuplé de prouesses technologiques. On nous promet des voitures autonomes, des diagnostics médicaux infaillibles, et même, soyons fous, la résolution des problèmes climatiques. Mais derrière cette façade brillante se cache une réalité beaucoup plus insidieuse : l’IA, telle qu’elle est développée et déployée actuellement, pourrait bien être le cheval de Troie qui nous dépossède de notre consentement éclairé.

Qu’est-ce que le consentement éclairé, au juste ? C’est le principe fondamental selon lequel toute décision qui affecte notre vie doit être prise en pleine connaissance de cause, après avoir reçu une information complète et compréhensible. C’est le socle de notre autonomie individuelle, le rempart contre la manipulation et l’exploitation. Et c’est précisément ce que l’IA, sournoisement, est en train de saper.

Comment ? En infiltrant tous les aspects de notre quotidien, de nos achats en ligne à nos interactions sociales, en passant par nos choix politiques. Les algorithmes d’IA, alimentés par des quantités astronomiques de données personnelles, sont capables d’anticiper nos désirs, de modeler nos opinions, et même de prédire nos comportements avec une précision effrayante. Ce qu’on appelle, dans le jargon, le machine learning (apprentissage automatique), c’est en réalité une extraction de données sur nos vies pour nous comprendre mieux que nous même.

Le problème, c’est que ces algorithmes sont souvent opaques, voire carrément inintelligibles pour le commun des mortels. On parle de « boîtes noires » : des systèmes complexes dont le fonctionnement interne nous échappe complètement. Nous ne savons pas comment ils prennent leurs décisions, quelles données sont prises en compte, ni quels biais peuvent les influencer. Et pourtant, ces décisions ont un impact direct sur notre vie : elles déterminent les publicités que nous voyons, les informations auxquelles nous avons accès, et même les opportunités qui s’offrent à nous.

Alors, où est le consentement éclairé dans tout ça ? Comment pouvons-nous consentir à quelque chose que nous ne comprenons pas ? Comment pouvons-nous exercer notre libre arbitre si nos choix sont subtilement orientés par des forces invisibles ? La réponse est simple : nous ne le pouvons pas. Nous sommes en train de devenir les marionnettes consentantes d’un système que nous avons nous-mêmes créé.

Et la situation ne cesse de s’aggraver. Avec le développement de l’IA générative, comme ChatGPT et ses semblables, la frontière entre le réel et le virtuel devient de plus en plus floue. Des textes, des images, des vidéos, tout peut être créé de toutes pièces par des algorithmes sophistiqués. Comment distinguer le vrai du faux dans un monde où la désinformation est industrialisée ? Comment se forger une opinion éclairée si l’information elle-même est manipulée ?

Face à cette menace, il est urgent de réagir. Il ne s’agit pas de rejeter l’IA en bloc, mais de la maîtriser. Il faut exiger la transparence des algorithmes, imposer des règles éthiques strictes, et surtout, éduquer le public aux enjeux de l’IA. Il faut que chacun comprenne comment ces technologies fonctionnent, comment elles nous influencent, et comment nous pouvons les utiliser à notre avantage, au lieu d’être utilisés par elles.

En d’autres termes, il est temps de reprendre le contrôle de notre consentement éclairé. Car si nous ne le faisons pas, nous risquons de nous retrouver piégés dans une dystopie numérique où notre liberté n’est qu’une illusion.

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